Actes de Présence est une collection de photos prises sur plusieurs années - une pratique journalistique, un archivage de la relation au paysage urbain, au quotidien, aux souvenirs et à leurs traces. Faire acte de présence, c'est faire une apparition. L’expression suggère être témoin d'un événement, mais elle implique aussi un certain engagement performatif, puisqu'on fait acte de présence surtout quand on est attendu. Samedi dernier, lors d'un concert à l'église du Sacré-Coeur de Jésus, rue Ontario, André Pappathomas, le chef de chœur, a présenté l'une de ses compositions. Il a attiré notre attention sur les gens qui habitent le quartier (ou plus précisément les intersections à proximité de l'église), les gens qui sont là tôt le matin, dormant sur les marches ou se rendant au travail. Les gens qu'il a l'habitude de voir en allant et en revenant de l'église. «On pourrait se permettre de penser» a t’il énoncé, « à toutes les prières, les souhaits, qui subsistent depuis les générations qui ont peuplé ces rues, cette église. Celles qui y flottent aujourd'hui, tous les jours. Et le son retentissant de ces invocations, comme les bancs en bois qui craquent en place après un concert.» Je pense au photographe, à sa pratique de dérive sans but précis, dans des rues familières et inconnues. Suivant les traces des surréalistes et des situationnistes, en attente de la rencontre fortuite - l'image. Et puis, comme les sons retentissants des prières, je pense à l'image comme si elle attendait l'œil. Dormante. Je me demande si le point de vue de l'écrivain n'est pas précisément à l'opposé de celui du photographe - enveloppé dans des intériorités, des récits et des réflexions qui se croisent. Ce que j'envie dans l'œil du photographe, n'est-ce pas une sorte de liberté? Une liberté qui n'est accordée que par le moment présent et une réponse instantanée à ce qui nous entoure. Texte par Marie Ségolène C Brault